Décryptage N°30 : Äddi Tanktourismus ? – Les effets potentiels

© photo : Julien Mpia Massa

Dans son Plan National intégré en matière d’énergie et de climat (PNEC), le Luxembourg ambitionne de baisser ses émissions de gaz à effet de serre (GES) de 55% hors système de quotas d’émissions (ETS) à l’horizon de 2030 par rapport à 2005 . Tous les secteurs sont concernés, et plus particulièrement le secteur des transports qui représente 60,9% des émissions luxembourgeoises hors ETS. En raison de son poids non-négligeable, le gouvernement souhaite réduire les émissions de ce secteur de 62%.

L’alignement des prix du carburant du Luxembourg et de la Grande Région, engendrant la sortie du tourisme à la pompe, est l’une des stratégies pouvant permettre au gouvernement d’atteindre ces objectifs. Cette stratégie, qui pourrait passer par une augmentation de la taxe carbone , mérite d’être débattue pour des raisons économiques, fiscales, mais aussi environnementales et sociales. Il convient en effet d’évaluer les conséquences auxquelles le Luxembourg pourrait être confronté dans le cas purement hypothétique où le gouvernement décidait d’ajuster le prix du carburant à celui de la Grande Région

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Äddi Tanktourismus ? – Les effets potentiels

Vers un marché ETS II pour réduire les émissions dans le secteur du transport routier ?

Cet article a été rédigé pour le magazine Merkur de janvier-février 2024.

Merkur 01/2024 : Logistique - Maillon essentiel de la diversification économique

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Compte tenu du succès « relatif » du marché ETS-I en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES), au sein duquel seuls les gros émetteurs de GES sont parties prenantes, l’Union européenne, dans sa directive 2003/87/CE[1], a annoncé la création d’un marché parallèle (ETS-II) à l’horizon 2027, qui inclurait les secteurs du transport routier et du bâtiment (carburants de transport et combustibles utilisés dans le bâtiment). Ce marché aura donc le rôle de déterminer un signal-prix du carbone suffisamment dissuasif pour réduire les émissions dans les secteurs concernés.

À la différence du marché ETS-I, dans ETS-II, les régulateurs interviendraient si nécessaire pour maintenir le prix au niveau d’un plafond de 45 euros la tonne de CO2 durant les premières années d’existence du marché. De plus, les pays qui le souhaitent pourront bénéficier d’une dérogation jusqu’en 2030 s’ils disposent d’une taxe carbone, pour les secteurs concernés, supérieure au prix moyen de mise aux enchères des permis d’émission. Ainsi, avec un prix à 45 euros la tonne de CO2 en 2026, un pays se donnerait la possibilité de demander une dérogation.

 Au Luxembourg, les secteurs concernés par ETS-II représentent environ 80 % des émissions de CO2. Bien que la transition soit déjà à l’œuvre dans le bâtiment, et semble être sur une bonne trajectoire grâce aux différentes mesures d’efficience énergétique et le déploiement des pompes à chaleur tels que prévus dans le projet de mise à jour du Plan National en matière d’Énergie et de Climat (PNEC), on en est encore loin concernant le transport. Pour ce dernier, malgré les mesures du PNEC, l’enjeu consisterait à la fois à accroître la contribution des résidents qui n’auraient pas encore opéré la transition vers la voiture électrique, mais également à renoncer à la manne financière que pourrait rapporter le « Tanktourismus » (tourisme à la pompe).

On pourrait alors se demander quelle serait la meilleure alternative pour la gestion des émissions dans le transport au Luxembourg : le PNEC ou le marché ETS-II ?

Les émissions dans le secteur du transport

Si le Luxembourg a fourni des efforts remarquables en matière de réduction des émissions de GES, s’élevant à -30 % en 2021 par rapport à 2005 (-18 % par rapport à 2013, selon les chiffres de European Environment Agency), le secteur du transport demeure sans conteste un grand émetteur de GES, du fait de sa forte dépendance aux combustibles fossiles. Les émissions de GES provenant du transport dans le pays représentent un peu plus de 60 % des émissions totales. Il faut noter que dans le secteur du transport routier, couvrant 55 % des émissions liées à la combustion d’énergie, dont près de deux tiers pourraient être attribués au « Tanktourismus », les émissions ont diminué de 18 % entre 2013 et 2022 (STATEC)(. La décarbonation serait donc en cours.

Quel instrument pour accélérer la décarbonation dans le secteur du transport ?

Parmi la panoplie d’instruments pouvant inciter à la baisse des émissions dans le transport, la taxe carbone est particulièrement appréciée, notamment pour des raisons économiques, puisqu’au-delà de responsabiliser les « pollueurs », elle permettrait de renforcer les moyens financiers de l’État.

Jusque-là, la gestion de la taxe carbone sur les carburants fossiles restait dans le cadre des différentes stratégies nationales de décarbonation. Mais, l’intégration européenne donne désormais la possibilité de passer par un marché.

Une politique nationale ambitieuse au Luxembourg, mais qui manque de visibilité à long terme

Concernant les secteurs dépendants des combustibles fossiles hors ETS-I, le Luxembourg prévoit, dans le PNEC, une augmentation de la taxe carbone[2] de 5 euros par an, pour atteindre 45 euros la tonne de CO2 en 2026, date d’échéance « provisoire » de cette mesure. Sous l’hypothèse de prix du carburant constants dans les pays voisins, cela représenterait une baisse de l’écart des prix des carburants de quelques centimes d’euros, ce qui ne serait évidemment pas suffisant pour baisser significativement le poids du Tanktourismus [3]. Le STATEC a, par ailleurs, montré qu’une hausse prolongée de 5 euros par an jusqu’en 2050 pourrait s’avérer efficace pour tourner le dos au Tanktourismus, surtout si elle est complétée par le développement de l’électromobilité [4]. Ce qui prouve la nécessité de se donner une vision à plus long terme pour la stratégie nationale de décarbonation du transport routier.

Un marché européen d’échange de quotas carbone (ETS-II) qui pourrait comporter certains risques

Si l’objectif du marché est de renchérir le prix des carburants fossiles, il le ferait surtout au détriment des politiques nationales de taxation carbone, qui aboutissent très souvent à des prix unitaires de carbone différenciés ; tandis que le prix dans le cadre d’un marché européen sera le même pour tous les pays. Dans un tel cas, les effets de la taxe carbone européenne seraient mixtes en raison des prix des carburants déjà différents selon les pays. En effet, sous l’hypothèse que les autres taxes (accises et TVA) soient constantes, seuls les pays qui pratiquaient une taxe largement inférieure à 45 euros la tonne verront leurs prix de carburants être significativement renchéris. Parmi les voisins du Luxembourg, seule la Belgique semble être dans ce cas, mais la moyenne des accises ainsi que la TVA sont plus basses au Luxembourg[5]. Le différentiel avec la Belgique s’accroitrait donc avec le marché. Le différentiel de prix avec la France resterait en revanche plus ou moins stable dans la mesure où ces deux pays auraient des niveaux de taxe CO2 sensiblement identiques.

Par ailleurs, d’autres risques seraient inhérents à ce marché, dont celui de l’harmonisation de la fiscalité carbone au niveau européen, ce qui n’est à ce stade pas possible avec les instruments fiscaux plus classiques. Quelle est donc la nécessité d’abandonner sa souveraineté en matière de fiscalité carbone ? Surtout si ce choix ne garantit pas une accélération de la décarbonation dans le secteur du transport. De plus, même si des mécanismes de redistribution sont prévus, il faudrait noter que ce type de marché taxerait de la même manière des ménages (européens) avec des niveaux de revenus très différents.

Si on comprend aisément l’idée d’intégrer les grandes entreprises dans un marché carbone, notamment pour des raisons stratégiques, il est plus difficile de considérer, à ce stade, qu’un mécanisme de marché peut baisser significativement les émissions dans le secteur du transport, particulièrement au Luxembourg.

Un marché européen pour le secteur du transport pourrait s’intéresser dans un premier temps au transport international de marchandises (transport routier de fret) afin d’éviter que les entreprises ne puissent optimiser leurs itinéraires pour s’approvisionner à moindre coût en carburant, avec des impacts encore plus prononcés sur les émissions, dus notamment à un potentiel accroissement des distances. S’il est complété par un mécanisme d’ajustement de la taxe qui prendrait en compte les spécificités de chaque pays, ce marché aurait l’avantage d’harmoniser le prix du carburant vendu aux professionnels dans tous les pays. Il accélèrerait également la transition des entreprises du secteur de la logistique.


[1] Directive 2003/87/CE

[2] La taxe carbone a été introduite au Luxembourg en 2021 au prix de 20 euros la tonne.

[3] Une taxe carbone à 200 euros au Luxembourg ? – IDEA (fondation-idea.lu)

[4] La vente aux non-résidents a baissé de 20,5% entre 2019 et 2021, mais est compensée par une hausse de 15% des ventes aux résidents, en raison de la croissance démographique.

[5] https://www.ccrek.be/docs/2022_06_AccisesProduitsEnergetiques.pdf

Une taxe carbone à 200 euros au Luxembourg ?

© photo : Julien Mpia Massa

Depuis le 16 novembre, le Luxembourg a un plan de marche pour les cinq années à venir. IDEA propose une série de blogs pour analyser quelques-uns des points saillants de l’accord de coalition 2023-2028. Dernier volet de cette série : quelques réflexions sur le niveau de la taxe carbone au Luxembourg.

Dans son programme de coalition, le gouvernement luxembourgeois s’engage à respecter la trajectoire de la taxe CO2 définie dans le Plan national intégré en matière d’énergie et de climat (PNEC). Pour rappel, la taxe carbone a été introduite en 2021 et s’établit désormais à 30 euros la tonne de CO2. Afin de réduire davantage les émissions de gaz à effet de serre (GES), le PNEC prévoit une augmentation annuelle de 5 euros au moins jusqu’en 2026, ce qui lui permettra d’atteindre le montant de 45 euros la tonne de CO2 à cette échéance, soit environ 11 centimes de plus sur le litre actuel de diesel. Dans la mise à jour du PNEC, le gouvernement met un accent particulier sur le renforcement des objectifs dans le secteur des transports. La cellule scientifique de la Chambre des Députés [1] reconnaît que le secteur des transports, qui représente 60,9 % des émissions de GES (hors ETS) au Luxembourg, est un secteur clé à considérer afin d’avoir un impact significatif sur la baisse des émissions de CO2. En 2022, deux tiers des émissions de ce secteur provenaient de la vente de carburant, dont environ 70 % peuvent être attribuées à des voitures immatriculées à l’étranger [2]. Ce tourisme à la pompe contribue donc largement à l’intensité apparente des émissions au Grand-Duché.

Une des manières de réduire le bilan CO2 du secteur du transport serait de renoncer au tourisme à la pompe [3]. En supposant, dans un contexte purement fictif, que le gouvernement décide de mettre fin à cet avantage compétitif, il pourrait opter pour un prix du carburant équivalent à celui pratiqué dans les pays frontaliers. Le Luxembourg serait donc moins compétitif sur les ventes de carburants et les non-résidents moins incités à s’y approvisionner. Quel est donc le prix de la taxe carbone qui permettrait d’harmoniser les prix de carburant ? Pour répondre à cette question, posons l’hypothèse que les taxes d’accises sont stables [4] au Luxembourg, ainsi que dans les pays voisins, et que le prix moyen du diesel sur les 5 années précédentes correspond peu ou prou à son prix moyen de long terme [5]. En France, les augmentations de la taxe carbone qu’elle avait prévues ont été suspendues après les manifestations du mouvement des gilets jaunes. Un changement de politique n’y est donc pas à prévoir à court terme. La Belgique, quant à elle, ne dispose pas de taxe carbone et son introduction n’est pas à l’ordre du jour à la lecture de son PNEC [6]. À politiques inchangées, le STATEC estime que chaque augmentation de 5 euros de la taxe carbone au Luxembourg réduit le différentiel de prix du diesel avec les pays voisins d’un peu plus d’un centime.

Dans l’absolu, le différentiel de prix de vente du diesel est plus élevé entre la Belgique et le Luxembourg, soit 45 centimes d’euros, suivi par la France et l’Allemagne. Une taxe carbone au Grand-Duché qui s’élèverait à 211 euros [7], équivalent à 7 fois la taxe carbone actuelle et représentant 51 centimes de plus par litre de diesel, pourrait permettre de réduire significativement le différentiel de prix de vente du diesel avec la Belgique. En ce qui concerne la France et l’Allemagne, la taxe carbone devrait être de 168 euros et 133 euros, respectivement.

Source: STATEC, Direction générale de l’Energie – SPF Economie, DGEC, ADAC; Calculs IDEA

La taxe carbone qui permettrait de réduire significativement les différences de prix de vente du diesel entre le Luxembourg et ses pays frontaliers, toutes choses égales par ailleurs, devrait donc se situer entre un plancher de 168 euros et un plafond de 211 euros [8]. Cette fourchette corrobore les recommandations d’une taxe carbone à 200 euros par tonne de CO2 éq. réclamée par l’Observatoire de la politique climatique et le Klima-Biergerrot.

La mise en place d’une telle taxe permettrait, certes, de faire baisser le bilan CO2 apparent du Grand-Duché, mais pourrait également engendrer un effet d’aubaine dans les pays voisins, plus particulièrement l’Allemagne. En effet, avec ces niveaux de la taxe carbone, le différentiel avec l’Allemagne pourrait s’inverser en faveur de ce dernier, avantageant ainsi les distributeurs de diesel allemands. Une réaction rationnelle des résidents luxembourgeois étant de s’approvisionner en diesel en Allemagne, la taxe CO2 aurait alors un effet sur le comportement des consommateurs qui ne serait pas nécessairement bénéfique pour leur bilan carbone. Ceci aurait certainement un effet négatif sur le secteur de la distribution de carburant au Luxembourg, mais également sur les recettes fiscales (pour mémoire, les recettes des accises sur les carburants représentaient 725,4 millions d’euros en 2022 [9]). À ce stade, il est difficile de se prononcer sur le sens de l’effet de l’introduction de la taxe carbone à ce niveau. Il serait donc nécessaire d’évaluer l’ampleur de la diminution des ventes de carburant, tout comme le potentiel d’une taxe carbone plus élevée à combler cette perte. Ces effets, parfois indésirables, doivent donc être pris en compte dans la détermination de la valeur de la taxe carbone.


[1] Note de recherche scientifique CS-2022-DR-028

[2] PNEC

[3] A noter qu’il s’agirait uniquement d’un transfert d’émissions vers les pays voisins et non pas d’une réduction absolue. L’effet de la réduction des émissions sera amplifié par l’interdiction de l’Union européenne de vendre des voitures neuves à essence et diesel à partir de 2035, encourageant ainsi l’électrification du parc automobile.

[4] La préférence d’agir sur le prix par le biais de la taxe carbone, au lieu des taxes d’accises, vient du fait que les recettes provenant de la taxe carbone sont fléchées. Ainsi, le gouvernement luxembourgeois utilisera les recettes à des fins sociales et environnementales uniquement. Cependant, l’effet sur les émissions de GES est équivalent.

[5] Les 5 années précédentes considérées sont de 2018 à 2022, de façon à lisser les variations de prix et de prendre en compte le choc de prix de 2022, provoqué par la guerre en Ukraine.

[6] L’Allemagne a mis en place un système de quotas national, fixant le prix du carbone au même prix que le Luxembourg en 2023.

[7] Les données utilisées dans nos calculs ont été extraites de différentes bases de données (STATEC, Direction générale de l’Energie – SPF Economie, DGEC, ADAC). Le prix du carbone permettant d’atteindre un différentiel de prix du diesel nul dans la Grande Région a été déterminé grâce à l’utilisation de la moyenne des prix de diesel TTC des clients professionels et résidents.

[8] Le différentiel de prix avec l’Allemagne étant relativement plus faible, nous avons décidé de ne pas la prendre en compte pour ne pas trop élargir la fourchette et perdre en efficacité.

[9] Tableau de situation budgétaire (décembre 2022)

Pour un budget vert « à la luxembourgeoise »

Le budget vert ou « Green Budgeting » consiste à évaluer de manière systématique l’impact environnemental des budgets publics, en considérant idéalement les impôts, taxes et redevances, les dépenses budgétaires et les différentes « dépenses fiscales ».

La France est en pointe en la matière. Les autorités budgétaires y ont en effet déposé, en octobre 2020, une annexe au projet de loi de finances 2021 (PLF) où est passée au crible l’incidence environnementale des crédits budgétaires et des dépenses fiscales de l’Etat, sur la base de 6 objectifs environnementaux inspirés d’une taxonomie européenne (voir la figure ci-jointe). Sont isolés parmi les agrégats budgétaires les postes présentant un lien avec au moins l’un des 6 objectifs. Ces postes se voient ensuite assigner, à l’aune de chacun des objectifs, une cotation « favorable », « défavorable » ou « neutre ».

Le « Budget vert » français a été préparé par un groupe de travail interministériel et ce bien en amont du dépôt du PLF.  Les dépenses budgétaires et les dépenses fiscales de l’Etat ayant fait l’objet d’une évaluation dans le cadre du « Budget vert » hexagonal se sont montées à 574 milliards d’euros, dont 53 milliards présentant un lien avec l’environnement. Ce dernier montant se décompose en 38 milliards ayant des retombées environnementales favorables, près de 5 milliards affichant un bilan neutre et 10 milliards accusant une incidence environnementale négative. Les « dépenses fiscales » représenteraient à elles seules un peu plus de 70% de cette dernière catégorie[1].

Figure : les 6 axes environnementaux du « Budget vert » français

budget vert

Source : Ministère de l’Economie, des Finances et de la Relance (France).

Sur le plan luxembourgeois et au vu de cette dernière constatation (tirée de l’expérience française, certes), il serait opportun dans un premier temps de mettre en place un « Green Budgeting » se focalisant sur la liste « officielle » des dépenses fiscales (reprise à l’annexe 10 du projet de budget pluriannuel 2020-2024, « Indications sur les dépenses fiscales et leur impact sur les recettes »). Cette liste renferme surtout des « niches fiscales » en relation avec l’immobilier, le Bëllegen Akt notamment. Elle devrait être élargie au plus grand nombre de « dépenses fiscales » possible, le coût budgétaire du leasing, par exemple (la France a quant à elle évalué quelque 475 dépenses fiscales dans le cadre de son « Budget vert »). L’impact environnemental de chaque « dépense fiscale » relevant de cette liste élargie serait désormais évalué (neutre, positif, négatif), à l’instar de la pratique française – le cas échéant en se concentrant (du moins au départ) sur la neutralité carbone. Afin d’améliorer son évaluation environnementale, le Bëllegen Akt, qui porte sur quelque 202 millions d’euros dans sa forme actuelle, pourrait en outre faire l’objet d’une modulation en fonction des performances énergétiques des bâtiments concernés.

Par ailleurs, il serait intéressant que le Luxembourg devienne dans les meilleurs délais membre du « Paris Collaborative on Green Budgeting » de l’OCDE, une initiative lancée le 12 décembre 2017, à l’occasion du « One Planet Summit »[2] aux côtés de la Grèce, du Mexique, des Pays-Bas, de la Norvège, de la Suisse, de La France et de l’Irlande. Cette initiative, qui est à l’origine du « budget vert » français, permettrait au Luxembourg de tisser des liens en la matière et d’accéder par ce biais aux méthodologies mises en œuvre dans les pays participants, évitant de « partir de zéro » dans ce domaine éminemment complexe.

Les défis méthodologiques risquent d’ailleurs d’être exacerbés, au Luxembourg, par le « Tanktourismus » qui va de pair avec de plantureuses recettes sur les énergies fossile (près de 2% du PIB en 2019 pour les seules accises). Ces recettes élevées constituent a priori un « bon point » dans le cadre du Green Budgeting.  Cette « performance » n’est cependant qu’un effet d’optique, associé aux achats de carburants par des non-résidents. Elle n’est nullement le reflet d’une fiscalité particulièrement incisive en matière d’énergies fossiles, ce dont toute « cotation environnementale » des recettes se doit de tenir compte.

Le but ultime du Green Budgeting est bien entendu d’identifier de manière transparente les points faibles du Luxembourg en matière de développement durable et d’élaborer en conséquence des mesures concrètes. Mieux évaluer pour mieux agir, en quelque sorte…


[1] Voir https://www.budget.gouv.fr/files/uploads/extract/2021/PLF_2021/rapport_IEE.PDF.

[2] Voir https://www.oecd.org/environment/green-budgeting/.