© photo : Julien Mpia Massa
Plus que dans n’importe quel autre pays, le marché du travail dessine le destin du Luxembourg et l’équilibre de ses finances publiques ; la grande sensibilité du régime général des pensions aux projections du nombre d’emplois illustre parfaitement cette réalité. Conscients de cela, les pouvoirs publics ont fait de la promotion de la participation au marché du travail un objectif à valeur constitutionnelle (« L’État garantit le droit au travail et veille à assurer l’exercice de ce droit » – art. 38) et consacré tout un chapitre du code du travail à des « mesures destinées à maintenir le plein emploi ».
Pourtant, alors que le code du travail retient deux seuils – définis en 1977 – de gravité du chômage (1.500 et 2.500 demandeurs d’emploi, qu’ils soient sans emploi ou sous préavis de licenciement) pour évoquer le plein emploi[1], le nombre de chômeurs était quasiment au même niveau – relativement élevé – en mai 2024 (17.470) qu’en mai 2014 (17.725).
Fait qui mérite d’être relevé, il y a eu durant la décennie écoulée une évolution différenciée entre les demandeurs d’emploi ayant une nationalité de l’UE-27 (-13%) et ceux de pays tiers (+80%).
Source : ADEM
Il s’agit là d’une manifestation de la diversité croissante de la démographie grand-ducale où la part de résidents étrangers en provenance d’un autre pays de l’UE est passée de 87% en 2011 à 81% en 2021[2].
La politique du plein-emploi ne devrait pas demeurer indifférente à cette évolution différenciée du chômage. Au-delà des réponses à trouver aux traditionnelles questions d’inadéquation sur le marché du travail (i.e. écart entre les qualifications des demandeurs d’emploi et les besoins de l’économie), de validation des acquis de l’expérience et de reconnaissance des diplômes obtenus dans des pays tiers, il sera(it) peut-être utile de développer et de suivre des indicateurs[3] (e.g. halo du chômage, taux d’inactivité au sein de la population d’âges actifs, etc.) complémentaires au taux de chômage[4] afin de pouvoir apprécier le plus finement possible la réalité de la participation des résidents d’âges actifs au marché du travail et de conduire la politique de l’emploi de façon optimale.
[1] Voir à ce sujet : Michel-Edouard Ruben (2015), OMT : Vers un objectif pour le marché du travail.
[2] Voir à ce sujet : Charlie Klein, François Peltier (2023), Une population de plus en plus cosmopolite.
[3] Voir à ce sujet : Michel – Edouard Ruben (2015), Au-delà du chômage : sous-emploi et « halo » du chômage.
[4] Voir à ce sujet : Armande Frising, Liliane Reichmann (2009), Regards sur le chômage : Qui s’inscrit à l’Administration de l’emploi?