Les contours de la réforme fiscale 2017, grand chantier de ce Gouvernement, ont été dessinés le 29 février, affinés le 21 avril, adoptés par le Conseil de gouvernement le 13 juillet avant d’être prochainement discutés à la Chambre des députés, et expliqués, jusqu’à fin septembre, par le Ministère des Finances, avec l’Administration des contributions directes, aux contribuables soucieux de connaître leur traitement fiscal futur. Un moment opportun pour IDEA de revenir sur les implications de cette réforme en matière de logement, de pensions, de marché du travail et d’innovation. Soit autant de défis à adresser et de recommandations à formuler.

« Le travail c’est la santé » chantait Henri Salvador et les chiffres lui donnent raison[1], puisque les chômeurs déclarent 2 fois plus fréquemment un « mauvais état de santé » que ceux en emploi. Le travail est par ailleurs un solide rempart contre le divorce des adultes, contre les difficultés scolaires des enfants et contre la pauvreté. Ainsi au Luxembourg, « seulement » 40% des chômeurs sont indemnisés, et le taux de risque de pauvreté est de 50% pour les demandeurs d’emploi, contre 11% pour ceux qui ont un emploi. Dès lors, une réforme fiscale qui se veut « un outil d’équité cherchant, notamment, à répondre aux défis actuels sur le plan social » devrait  (logiquement) chercher à favoriser la création d’emplois compte tenu des « bienfaits » susmentionnés du travail. L’emploi est cependant (relativement) absent des objectifs de la réforme, et… personne (nous inclus donc) ne s’en était vraiment ému après les présentations préliminaires du projet de réforme fiscale en février et avril 2016.

Les près de 500 millions d’euros annuels de baisse de la fiscalité en faveur des ménages permis par la suppression de l’IEBT et la modification des barèmes d’imposition ne permettront de créer (au maximum) que … 720 emplois par an selon les calculs du STATEC[2]. Sur la base d’un calcul de « coin de table », chaque emploi ainsi créé revient donc à plus d’un demi-million d’euros. Certains objecteront (peut-être) qu’il n’y a pas besoin de « coup de pouce » supplémentaire pour l’emploi dans un pays qui crée plus de 10.000 postes nets par an et qui dispose déjà d’un arsenal d’aides à l’emploi très fourni et à l’efficacité pas toujours (re)connue.

Néanmoins, parce qu’il y a plus de jeunes au chômage au Luxembourg que d’apprentis diplômés par an, parce que près de 50% des demandeurs d’emploi le sont depuis plus de 12 mois, parce que 50% des chômeurs de plus de 50 ans le sont depuis plus de 24 mois, parce que 70% des demandeurs d’emploi n’ont pas de diplôme de fin d’études secondaires, il n’est pas « insensé » de dire, malgré un taux de chômage « acceptable » de 6,5%, qu’il y a matière (et nécessité) à faire davantage.

Dès lors, l’impulsion fiscale en faveur des ménages (500 millions d’euros, dont près de la moitié ira aux frontaliers) n’aurait-elle pas été plus « utile » (pour l’équité, la cohésion sociale), si au moins une fraction avait été de préférence :

  • A l’ADEM (dont le budget de fonctionnement est de 28 millions d’euros) ?
  • Aux actions visant à doter les demandeurs d’emploi de meilleures compétences (20 millions d’euros dépensés en 2015 par le Fonds pour l’emploi)?
  • Au financement d’une politique de zéro charge ou de subventions salariales (Kombilohn) pour l’emploi d’un chômeur inscrit à l’ADEM sans condition d’âge ni de durée d’inscription afin de permettre une « montée » en puissance de l’initiative « Entreprises partenaires de l’emploi »?

[1] Voir : Partha D., Gallo W., Ayyagari P., Fletcher J., Sindelar J., (2011), « The effect of job loss on overweight and drinking » et Mesrine A., (2000), « La surmortalité des chômeurs : un effet catalyseur du chômage ? », Economie et statistique, n°334.

[2] Voir : http://www.statistiques.public.lu/catalogue-publications/regards/2016/PDF-17-2016.pdf.

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