Actuellement, le Luxembourg se demande quel adjectif (intensive, qualitative, durable, soutenable, sélective, extensive, inclusive, équitable, etc.) accoler à sa croissance. L’avenir dira qui aura eu raison dans cette bataille sémantique. Le présent nous enseigne cependant que le PIB luxembourgeois est hautement « productif » en ce sens qu’il est principalement marchand. En décomposant la richesse globale produite en PIB marchand et PIB non-marchand, on observe que le recours au non-marchand est moins courant au Luxembourg que dans les autres pays européens. La part du non-marchand dans le PIB total y est ainsi de 3 points inférieure par rapport à la moyenne de la zone euro, et jusqu’à 5 points de moins qu’en Belgique et en France.
Part de la Valeur ajoutée du non marchand dans le PIB en %
Source: Eurostat
L’activité principalement non-marchande se caractérise généralement par un financement prélevé sur l’ensemble des contribuables, que ceux-ci aient bénéficié du service ou non. Les activités concernées regroupent l’administration publique, l’enseignement, ainsi que la santé humaine et action sociale.
Compte tenu de la forte progression de l’emploi non-marchand au Luxembourg entre 2005 et 2016 (+52%, quand l’emploi total progressait de 36%), la relative stabilité du PIB non-marchand peut questionner. Le Luxembourg aurait-il trouvé la martingale gagnante puisque les rémunérations du secteur-non marchand (10,8% du PIB en 2005, 11,4% du PIB en 2016) sont restées également relativement stables ? Difficile à dire, mais au moins 4 explications peuvent être avancées concernant ce résultat:
- Près de 65% de la hausse de l’emploi dans le secteur non-marchand vient de l’activité santé humaine et action sociale. Dans ce secteur où l’emploi est à 70% féminin, 40% des travailleurs sont à temps partiel et 10% en cdd. La hausse de l’emploi observée serait donc en équivalent temps plein moins prononcée avec in fine un effet « modérateur ».
- La population luxembourgeoise étant relativement jeune, la demande de services de santé est (encore) relativement contenue.
- La création de richesse au Luxembourg repose sur le travail frontalier alors qu’une partie des coûts non-marchands en direction des frontaliers sont supportés par leurs pays respectifs. Les dépenses d’éducation (des travailleurs frontaliers et de leurs enfants) sont grandement prises en charge dans leurs pays ; aussi, les frontaliers sont principalement « administrés » dans leurs lieux de résidence.
- L’économie luxembourgeoise, tirée notamment par le secteur financier (25% de l’économie), est hautement productive. Pour cette raison de composition sectorielle, le PIB marchand luxembourgeois est « structurellement » plus élevé que dans d’autres pays ne reposant pas sur un mix sectoriel aussi avantageux[1].
[1] Voir : http://ec.europa.eu/eurostat/news/themes-in-the-spotlight/gva-employment