Inflation, index et productivité: un possible ménage à trois?

Par Marc WAGENER et Muriel BOUCHET

Bientôt centenaire, « den Index » appartient au Luxembourg comme le Kachkéis, les vignobles de la Moselle et les formations rocheuses du Mullerthal. Il polarise, il interpelle. D’aucuns l’élèvent au rang de garant de la paix sociale. D’autres estiment qu’il pénalise excessivement une économie ouverte et exposée aux pressions compétitives extérieures. Est-ce l’inflation qui provoque l’index ou l’index qui provoque l’inflation, ou les deux ? Voilà encore un « débat canonique » que cette contribution vise à élargir au-delà des positions binaires.

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TEASER – Productivité, salaires, inflation : pour un débat décomplexé

par Marc WAGENER et Muriel BOUCHET

RDV lundi 29 février pour la publication du Working Paper!

Bientôt centenaire, « den Index » appartient au Luxembourg comme le Kachkéis, les vignobles de la Moselle et les formations rocheuses du Mullerthal. Il polarise, il interpelle. D’aucuns l’élèvent au rang de garant de la paix sociale. D’autres estiment qu’il pénalise excessivement une économie ouverte et exposée aux pressions compétitives extérieures. Est-ce l’inflation qui provoque l’index ou l’index qui provoque l’inflation, ou les deux ? Voilà encore un « débat canonique » qui fait jaser. L’observateur avisé de la vie socio-économique luxembourgeoise se rend vite compte que la place de l’index dans le dialogue, respectivement le monologue, social prend une ampleur telle qu’il mène à un effet d’éviction : d’autres sujets, d’autres défis sont insuffisamment discutés et commentés car l’index fait échouer des tripartites et échauffe les esprits.

Qu’est-ce qu’IDEA peut faire pour apporter une contribution à ce débat ? Tout d’abord, ce qu’IDEA ne fera pas : produire une énième étude sur le sujet, ses tenants et ses aboutissants, ses forces prétendues, ses faiblesses invoquées. A IDEA, on s’est dit : il faut élargir le débat. Indépendamment du lien de causalité entre inflation et indexation, l’index donne lieu, « accross-the-board », à des augmentations (nominales) des salaires (et de nombreuses prestations sociales, « for that matter »). Si l’index n’existait pas, la « compensation du pouvoir d’achat » se ferait par d’autres moyens comme la négociation sectorielle, au niveau de l’entreprise. Or l’index existe.

Etant donné qu’environ 80% des évolutions salariales au Luxembourg correspondent à l’indexation des salaires, à IDEA, on s’est dit plusieurs choses. Premièrement, on constate qu’une compensation de l’inflation par une revalorisation nominale des salaires a lieu dans des pays qui ne connaissent pas l’indexation. Elle serait à ce moment-là non pas « ordonnée » par l’Etat ou du moins régie par la loi, mais négociée (sans doute différemment) par secteur et/ou par entreprise. Deuxièmement, si le salarié est légitimement intéressé par le pouvoir d’achat que sa rémunération lui offre, l’entrepreneur est tout aussi légitimement intéressé par la conduite de ses affaires, par sa capacité à s’imposer sur le marché. Ainsi, il faudrait déjà inventer un système qui concilie ces deux intérêts, l’index semblant, de ce point de vue, unilatéral car il ne prend pas en compte la capacité de l’entreprise à pouvoir payer les augmentations, même nominales. Le tout sans tenir aucunement compte du contexte – par exemple un choc pétrolier qui pénalise doublement nos entreprises. Ensuite, au-delà du nominal, il y a une dimension réelle. Ce « réel » peut être appréhendé, en termes macroéconomiques, par la productivité.

Si nous parlons de « croissance économique », nous parlons soit de plus d’emplois, soit de plus de production par heure travaillée (ou des deux choses à la fois). La productivité, c’est la capacité des entreprises à transformer des entrants (travail et capital) en une production. Si la productivité augmente, l’entreprise a plus de marge de manœuvre pour faire évoluer les salaires. La productivité apparaît donc comme un étalon de mesure de la capacité des entreprises à augmenter les salaires : si, en une heure de travail, l’entreprise sait produire davantage, elle peut aussi rémunérer davantage ses facteurs de production.

IDEA a donc tenté de trouver un dénominateur commun. Récapitulons : l’inflation (concept nominal) donne lieu à l’index qui donne lieu à des hausses salariales « compensatoires » (nominales aussi). Retour à la case départ. Au-delà du nominal, il y a toujours une dimension réelle, une dimension qualitative, une notion de progrès et d’efficience. Or, qui dit efficience économique dit équité sociale : si l’efficience (la productivité) économique augmente, la richesse produite (le PIB) augmente et il est possible de redistribuer davantage aux salariés. C’est la progression réelle des salaires. Cette progression réelle, elle, devra être négociée au niveau sectoriel et/ou à l’échelle de l’entreprise. Mais elle ne peut durablement avoir lieu que si les gains de productivité se réalisent.

Ce que nous proposons dans une publication à paraître, n’est ni plus ni moins qu’une façon d’instaurer un instrument de mesure permettant de mettre en musique le monstre du Loch Ness – souvent invoqué mais jamais aperçu – du lien entre productivité et salaires. Rappelons, par exemple (et il s’agit vraiment d’un exemple parmi une multitude), l’accord tripartite de 2006 : « Le Gouvernement et les partenaires sociaux conviennent que la politique salariale doit dans le moyen terme respecter l’évolution de la productivité générale de l’économie luxembourgeoise. Ils rappellent leur engagement pour une politique salariale qui prend en considération la situation spécifique des différents secteurs et entreprises et qui est menée en toute autonomie par les partenaires concernés ».

C’est dans cette perspective qu’IDEA a élaboré une première proposition concrète, sans aucun doute perfectible et ne constituant que l’amorce d’une étude plus large et plus détaillée. Cette première proposition vise à « tuer dans l’œuf » tout dérapage excessif des salaires par rapport à la productivité. L’idée est que la productivité, étalon de mesure de la santé et de la compétitivité économique, puisse servir de glissière de sécurité afin de mieux encadrer l’évolution des salaires. Ce lien entre salaires et productivité ne s’effectuerait pas « au jour le jour » ou en temps réel : le mécanisme proposé ne serait déclenché que lorsque le décrochage entre les salaires et la productivité excéderait un seuil donné. En outre, le déclenchement en question n’impliquerait pas un brusque ajustement des salaires nominaux : cette correction ne s’effectuerait que graduellement. En d’autres termes, le « mécanisme de correction » des écarts entre la progression des salaires et celle de la productivité s’effectuerait de manière lissée.

Le mécanisme proposé par IDEA préserverait au demeurant la philosophie de déclenchement de tranches indiciaires. Ce mécanisme d’ajustement aux prix ne serait suspendu que lorsque l’évolution cumulative de la productivité n’est plus en mesure de soutenir la progression des salaires. La modulation qui résulterait de ce mécanisme serait bien plus objective et prévisible pour les salariés que dans les présentes circonstances : à des bricolages imprévisibles (modulation discrétionnaire) se substitueraient des ajustements graduels, découlant de critères précis et transparents (modulation objective).

De manière plus précise, le mécanisme de formation des salaires proposé par IDEA reposerait sur un indicateur de référence macroéconomique établi à partir de statistiques publiques, soit le ratio de la productivité réelle aux salaires réels moyens : le numérateur serait un indicateur de santé des entreprises, tandis que le dénominateur refléterait le pouvoir d’achat des ménages: l’équilibre parfait, en somme. En attendant une déclinaison sectorielle, l’indicateur serait d’abord dégagé pour l’ensemble de l’économie marchande.

Concluons. Le maintien du pouvoir d’achat des consommateurs suite à l’évolution de l’Indice des Prix à la Consommation National, sous-jacente à l’indexation, est légitime en soi : si l’inflation n’était jamais compensée, les salaires réels baisseraient, résultant in fine en moins de consommation, moins d’activité et moins d’emploi. Dans des pays ne connaissant pas une indexation automatique, la composante de l’adaptation des salaires à l’inflation est, dans une large mesure, intégrée dans les négociations tarifaires sectorielles ou encore au niveau de l’entreprise. Au Luxembourg, la formation de salaires étant largement encadrée par l’indexation (et par l’existence et l’ajustement récurrent d’un salaire social minimum), la négociation tarifaire peut se concentrer « sur la marge » : la différence entre la productivité réelle et l’évolution salariale y compris l’indexation, la compensation de l’inflation ayant déjà eu lieu.

Le système proposé dans la publication à venir s’apparente à une modulation permanente (certes ajustable en fonction de l’expérience acquise au fil du temps) et (semi-)automatique du système d’indexation actuel. En effet, l’observation de l’évolution de la productivité et des salaires serait permanente et l’indexation serait appliquée au cas où il y aurait une congruence suffisante entre les deux paramètres. Elle serait par contre retardée – automatiquement ou de manière concertée – à défaut. Aux yeux des acteurs économiques, un tel système permanent, et de surcroît fondé sur une logique économique saine pour les deux parties prenantes, aurait des mérites certains : il serait visible, compréhensible, explicable et permanent.

La proposition d’IDEA se veut constructive et IDEA souhaite lancer le débat quant à l’établissement d’un lien entre la productivité et les salaires – une nécessité souvent mise en avant mais rarement, sinon jamais, mise en musique. Objectivité oblige, IDEA met par ailleurs sur table, de manière ouverte et transparente, un grand nombre de défis : la mesure même de la productivité dans une économie de services, les écarts sectoriels en la matière, les révisions ex-post des comptes nationaux, la prise en compte de la composante conjoncturelle de la productivité pour tirer les bonnes conclusions. Ainsi, il faudrait aller plus loin, analyser en profondeur l’ensemble de ces éléments.

Ce qu’IDEA souhaite, c’est une discussion de fond sur ces paramètres. Ce qu’elle aurait du mal à accepter, par contre, est l’invocation ad vitam aeternam d’arguments méthodologiques et techniques pour tuer dans l’œuf un mécanisme « productivité / salaire », sachant que les mêmes failles sont sous-jacentes au statu quo et que le système proposé est meilleur que la statu quo car il permet de « réunir sous un même toit » les intérêts de court terme et de long terme et les intérêts des salariés et des entreprises.

Ce qu’on demande, c’est qu’au Luxembourg, le bénéfice du doute soit plus souvent laissé aux nouvelles idées.

A lundi, STAY TUNED !

Turbulences sur les marchés financiers : faut-il (commencer à) avoir peur? (1/2)

Depuis le début de l’année, les marchés financiers tanguent. Se rappelant peut-être du cinglant « Why did nobody notice it? » de la Reine Elizabeth après la crise des subprime, certains commentateurs s’empressent de dire que la baisse quasi-généralisée des marchés financiers annonce une récession toute proche et une crise financière pour bientôt. Disent-ils vrai? Comme souvent quand il s’agit du futur, impossible de le savoir vraiment. Alors prenons le parti d’être « objectivement » optimiste!

Les économistes (moi inclus) se trompent régulièrement!

En 2011, certains prévisionnistes (et non des moindres) écrivaient que « les années qui viennent seront marquées par une succession rapprochée de crises pétrolières (…) qui propulsera les cours du pétrole jusqu’à 150 dollars le baril, voire 200 ou davantage ». Ce qui se révèlera totalement faux. Ceux qui prédisent une crise soudaine et prochaine peuvent très bien, une fois de plus, se tromper ! Il est par ailleurs important de garder à l’esprit que depuis 1950 une récession n’a succédé à une baisse trimestrielle des marchés boursiers que dans 30% des cas. Nous pouvons donc (malgré le recul actuel des bourses mondiales) être (à 70%) confiants !

Les grandes institutions ne prévoient pas d’effondrement de la croissance!

Si compte tenu des difficultés de nombreux pays émergents, du (relatif) ralentissement cyclique américain et des oscillations des cours boursiers l’OCDE a révisé (en février) à la baisse ses prévisions pour 2016, la croissance mondiale devrait « tout de même » atteindre le même niveau qu’en 2015 – à savoir 3%. L’Europe pourrait d’ailleurs s’en tirer à bon compte. Selon la Commission européenne, la croissance devrait ainsi accélérer dans la zone euro en 2016 (1,7% après 1,5%). Le redressement espagnol devrait se poursuivre, l’économie italienne (malgré les difficultés de certaines (petites) banques) devrait bénéficier – entre autres – d’une politique budgétaire légèrement expansionniste, la France devrait connaître son taux de croissance le plus élevé depuis 5 ans (proche de 1,5%), la Belgique devrait de nouveau atteindre un « correct » 1,3% de hausse du PIB, et la Bundesbank dans son premier bulletin de l’année a déjà annoncé que la croissance de l’économie allemande serait robuste au premier trimestre 2016, de bon augure pour le reste de l’année. Sous l’hypothèse (réaliste) que les prévisions de la Commission se révèleront vraies, il ne serait pas surprenant que la croissance luxembourgeoise tutoie les 4% en 2016.

Les Banques centrales sont un indéfectible soutien

Il est vrai que l’« inventivité » monétaire n’a pas su relancer l’inflation. Mais savoir que la Fed est prête à faire une pause dans sa normalisation de politique monétaire compte tenu des difficultés des pays émergents et que la BCE est disposée à aller encore plus loin – pour (officieusement) garantir un euro bon marché et faciliter le financement des entreprises et des Etats de la zone euro – a quelque chose de très rassurant. Cela devrait d’ailleurs permettre une remontée prochaine des cours boursiers.

En somme, malgré la volatilité sur les marchés financiers, la non-accélération souhaitée de la croissance mondiale, les risques politiques (Brexit, suite des élections espagnoles et portugaises, crise des réfugiés) ou les interrogations (justifiées ?) concernant certaines banques en Europe, il est permis (et même conseillé) de « croire » que le pire, pourtant jamais incertain, n’est pas (forcément) pour tout de suite.

Les défis du Luxembourg passés au crible de sa jeunesse

Dans un précédent blog, nous évoquions notre échange autour de l’idée du mois consacrée à la financial literacy avec plusieurs organisations de jeunesse du Luxembourg. Mais nous ne nous sommes pas arrêtés en si bon chemin… La vision de l’avenir du pays par c(s)es jeunes a également été recueillie. Nous vous en livrons ici un aperçu.

Les participants (CSJ, Déi jonk gréng, JDL, JSL, JEL) ont ainsi été invités à prioriser 5 thèmes sur lesquels IDEA planchera cette année, en fonction de leur degré d’importance pour le développement du Luxembourg. De la compétitivité, au logement en passant par la pauvreté, la santé et la sécurité ou encore la fiscalité, le champ des possibles était large et les chantiers identifiés nombreux.

Classement des priorités parmi les 5 thèmes proposés par IDEA

Organisation Top 3 des priorités (par ordre d’importance)
Chrëschtlech-Sozial Jugend (CSJ) Logement/Pauvreté/Compétitivité
Déi jonk gréng (DJG) Pauvreté/Logement/Santé et sécurité
Jeunesse Démocrate et Libérale (JDL) Logement/Compétitivité/ Pauvreté
Jonk Entrepreneuren Lëtzeburg (JEL) Logement/Compétitivité
Jonk Sozialiste Lëtzeburg (JSL) Logement/Santé et sécurité/Pauvreté

Sans (véritable) surprise, le logement s’est imposé comme le défi prioritaire pour 4 des 5 organisations présentes (CSJ, JDL, JEL, JSL). Déi jonk gréng, eux, ont ont placé la pauvreté au sommet des priorités, le logement arrivant second. Les propositions avancées par les participants ont toutes convergé vers la nécessité de le rendre plus abordable.

Au-delà de ce « classement », la discussion a permis de capter le regard affûté de jeunes Luxembourgeois sur les défis à relever et les espoirs qu’ils nourrissent pour l’avenir du Luxembourg.

Ainsi, Estelle Malané (JDL) a évoqué la richesse de la multiculturalité et du dialogue interculturel sans sous estimer les enjeux de la migration et de l’intégration, comme celui d’accorder les mêmes chances de départ à tous. Le développement de la place financière et la nécessité d’assurer le développement plus durable et plus stable de l’économie ont aussi été abordés.

Gina Arvai (Déi jonk gréng), après avoir mentionné le Nowuesspak de son parti (mobilité, logement, referendum et sharing economy) a avancé de nombreuses propositions pour relever le défi du logement : d’un plus grand nombre de logements sociaux, aux coopératives d’habitation en passant par un cadre réglementaire pour la colocation. Puis, elle a proposé de « new economics foundations » dont le projet phare serait la réduction des heures de travail (21 heures hebdomadaires par exemple). Le maintien du niveau de protection (Déi jonk gréng) et de cohésion sociales (JSL) a également été mis en avant.

Les deux organisations se sont également retrouvées sur le thème d’une diversification économique plus verte. Pour ce faire, Paul Matzet (Déi jonk gréng) a proposé une revalorisation du statut des artisans et une transition vers une agriculture et une consommation biologiques et locales. Elisabeth Margue (CSJ) a, elle aussi, mis en avant le développement durable, dans son acception la plus large, valorisant le maintien des acquis pour les générations futures donc l’enjeu de la soutenabilité des finances publiques (réduction de la dette et financement des pensions), la nécessité de suivre de près le processus de digitalisation (défis et opportunités), la lutte contre le chômage des jeunes, ou encore le changement climatique.

Pour aborder ces transformations, Estelle Malané (JDL) estime que l’éducation doit être un chantier prioritaire au Luxembourg. De même, pour Nelson Fragoso (JEL), l’adaptation de la société, et particulièrement du cadre scolaire, aux réalités socio-économiques, aux nouvelles technologies et aux métiers de demain est une priorité. De même pour Paul Matzet (Déi jonk gréng), qui appelle à moins focaliser sur les connaissances brutes et plus sur la manière de les (re)trouver ou sur le développement de l’esprit critique.

Enfin, pour Nelson Fragoso (JEL), promouvoir l’esprit d’entreprise et de création auprès des jeunes, et développer un environnement propice pour les start-ups, pour Elisabeth Margue, sont indispensables à l’essor du pays.

Cette rencontre a trouvé un écho favorable dans le « Rapport national sur la situation de la jeunesse au Luxembourg en 2015 », rédigé par la Faculté des Lettres, des Sciences Humaines, des Arts et des Sciences de l’Éducation de l’Université de Luxembourg et remis au ministre de l’Éducation nationale, de l’Enfance et de la Jeunesse, Claude Meisch, le 3 février dernier. Il met notamment en exergue la difficulté des jeunes à trouver un logement – l’offre sur le marché luxembourgeois étant restreinte, et, souvent, coûteuse pour un jeune actif.

Selon Albert Einstein, « un problème sans solution est un problème mal posé ». Les échanges vont donc se poursuivre pour tenter d’apporter des réponses plurielles à ces problématiques concrètes.

Les quatre libertés fondamentales : tout ou rien

Les études sérieuses et pseudo-scientifiques se multiplient, mettant en exergue, dans un ton plus ou moins dramatique, les conséquences de ce que je pourrais appeler, car ce genre de néologismes et de contractions est très à la mode, le « Schengxit ». La liberté fondamentale de la libre circulation des personnes est de plus en plus remise en question. Il y a quelques années, des voix isolées avaient déjà appelé aux contrôles aux frontières. Or, il y avait eu une levée de bouclier, les propos afférents étaient fortement critiqués. L’on invoquait des possibles réactions à la chaîne, le début de la fin. Aujourd’hui, le Schengen-Bashing est devenu ce que les Allemands appellent « salonfähig » : il est tout à fait présentable, convenable d’en parler. Il n’est plus considéré, dans de nombreuses discussions, comme répréhensible de remettre en question la libre circulation des personnes de manière isolée.

Somme toute, pourquoi ne pas viser une Europe à la carte, une Europe modulable, un « my Europe » avec une version de base et des options au gré des intérêts nationaux du moment ? Opt-in ou opt-out, « union toujours plus étroite » pour les uns et union « toujours plutôt légère » pour les autres. Beaucoup de libre circulation de biens, s’il-vous-plaît, notamment pour les biens que je fabrique et que je souhaite exporter, un peu de libre circulation des services, la libre circulation des capitaux pour investir chez moi mais pas trop non plus pour ne pas perdre le contrôle « national » d’une partie d’un marché, sur le papier, commun, la libre circulation des personnes pour attirer les meilleures têtes, mais sinon plutôt non car la « multi-culturalité » ne fonctionne pas, et finalement, « nous n’avons pas l’habitude des étrangers ».

Une telle Europe ne peut pas fonctionner durablement. Une ligne de fracture Nord / Sud a été ouverte dans le sillage de la crise de dettes souveraines. Une nouvelle fissure Est / Ouest s’ouvre. Et à l’intérieur de certains Etats membres, ça part dans tous les sens entre appels à la solidarité, à la responsabilité, d’une part, et populisme et rejet, d’autre part. Non, l’Europe, qui a tant apporté aux Européens et aux Luxembourgeois en particulier, n’est pas dans un bon état. Le tremblement de terre s’annonce.

La réconciliation franco-allemande, le marché commun, les accords de Schengen, l’euro : le berceau du niveau de vie d’un pays appelé Grand-Duché de Luxembourg, qui a toujours habilement pu tirer son épingle du jeu, en embrassant les étapes d’intégration européenne et en intégrant les nouvelles libertés dans son développement économique et social. Un pays qui a toujours compris que l’Europe, c’est plus que la somme des parties. Si nous admettons que chaque étape d’intégration majeure a apporté des gains significatifs de bien-être au Luxembourg, nous devons aussi admettre que chaque étape de désintégration aboutira au résultat contraire.

Les libertés fondamentales forment un tout. Enlever une pièce du fondement de la « tour » c’est risquer son écroulement. Un million de réfugiés dans une Union qui compte 510 millions d’habitants, c’est un million de destins individuels mais c’est aussi un défi de… 0,2% qui ne peut pas remettre en question tout ce qui a été construit depuis la CECA (même si, disons-le, ces 0,2% semblent assez mal répartis sur les 28 Etats membres). L’Europe est sous observation. D’autres se frotteraient les mains si l’Europe se déchirait.

La fin du travail approche-t-elle?

La crainte de la fin du travail a été, dans une certaine mesure, au cœur du dernier forum de Davos dont l’un des principaux thèmes était « le futur des emplois ». Un rapport publié à cette occasion a d’ailleurs servi le propos. Selon ce rapport, 5 millions d’emplois pourraient être supprimés dans les 15 principales économies d’ici à 2020, en cause : « l’automatisation et la désintermédiation ». Serait-ce là, une preuve supplémentaire de la survenue prochaine du chômage pour tous? ni oui, ni non, bien au contraire, quoique peut être!

Les nouvelles technologies ont toujours été une source de crainte[1] pour la valeur travail

Vers la fin du 16ème siècle, William Lee a dû fuir l’Angleterre à cause de « sa » nouvelle technologie. Il venait d’inventer la machine à tricoter les bas et la Reine d’alors lui avait dit : « Thou aimest high, Master Lee. Consider thou what the invention could do to my poor subjects. It would assuredly bring to them ruin by depriving them of employment, thus making them beggars ». N’écoutant que sa créativité et sa fougue d’entrepreneur, il tenta de passer outre la mise en garde de la Reine et trouva un associé-financeur (George Brooks) afin de développer et commercialiser son invention. Ce dernier fut arrêté (et exécuté) pour trahison. William Lee vogua alors vers un pays plus clément envers les inventeurs et les ruptures technologiques… à savoir la France.

Dans Perspectives économiques pour nos petits enfants (1930), Keynes écrivait que « nous sommes actuellement affligés d’une maladie nouvelle dont certains lecteurs peuvent bien ignorer encore le nom, mais dont ils entendront beaucoup parler dans les années à venir, qui est le chômage technologique » et qui est « dû au fait que nous découvrons des moyens d’économiser de la main-d’oeuvre à une vitesse plus grande que nous ne savons trouver de nouveaux usages du travail humain ».

Mais la « destruction créatrice » de Joseph Schumpeter a prévalu

En dépit des craintes formulées au cours de l’histoire, les chocs technologiques n’ont pas entrainé la fin de l’emploi ; on a même observé le contraire. En effet – grâce notamment à la démocratisation de l’éducation et au progrès technique – les emplois détruits dans des secteurs en déclin ont pu être remplacés par de nouveaux postes dans des secteurs en expansion. Les emplois industriels ont ainsi offert des débouchés alors que bien des activités agricoles étaient automatisées, puis les services ont pris le relais de l’industrie selon le principe de déversement des emplois. Les craintes se sont ainsi révélées infondées car la « masse d’emplois nécessaire » n’est pas fixe[2], de telle sorte que « l’intuition » schumpétérienne de « destruction créatrice », même avec l’essor des TIC, s’est révélée vraie. D’ailleurs, les Etats-Unis, patrie des nouvelles technologies, ont créé en moyenne 204.000 emplois par mois depuis 2011, et chaque année au sein des économies de l’OCDE, environ 10% des entreprises disparaissent, et le nombre d’entreprises créées représente 10% des entreprises existantes.

Nouvelle donne ?

Mais la révolution industrielle en cours – qui combine internet des objets, impression 3D, big data, stockage de l’énergie, nanotechnologies, développement de la robotique – serait une menace très sérieuse pour de nombreux emplois, voire pour des secteurs d’activité. Compte tenu du degré sophistiqué des techniques, des tâches de plus en plus complexes (et donc également des emplois moyennement voire très qualifiés) devraient être concernées, et des entreprises de nombreux secteurs “pourraient” remplacer une partie de leur main-d’oeuvre salariée de masse par de petites équipes extrêmement qualifiéees et des technologies intelligentes. La destruction créatrice schumpetérienne laisserait alors place à une création destructrice (beaucoup d’emplois peu, moyennement, et très qualifiés détruits, et seulement une poignée d’emplois hautement qualifiés nécessaire). D’autres auteurs, moins alarmistes, considèrent que la troisième révolution industrielle ne sera pas synonyme (dans un horizon prévisible) de la fin des emplois mais induira un changement de nature du travail. Ce n’est pas tant l’emploi qui risque de disparaitre, mais le salariat (90 et 95% de l’emploi total dans les pays développés) qui deviendrait une organisation du travail désuète. La nouvelle économie serait alors celle de la pluriactivité et des indépendants (économiste dans une asbl à mi-temps et donnant des cours d’économie le reste du temps, juriste pour plusieurs entreprises, vendeur sur plateforme internet, revendeur d’électricité stockée, etc.).

Qui dit vrai?

A la question de savoir « Qui dit vrai entre ceux qui annoncent la fin prochaine du travail avec l’automatisation massive et ceux qui évoquent la pluriactivité permise par la désintermédiation? », nul ne connait la réponse – et quiconque prétend le contraire ment (au mieux avec sincérité). D’autant plus que d’autres économistes et scientifiques (tout aussi respectables) affirment que la destruction créatrice continuera d’opérer, que l’essor des travailleurs indépendants annoncé ne se voit pas vraiment dans les statistiques[3], que les emplois de demain ne sont pas encore connus, et que le cerveau humain est un million de fois plus puissant que les ordinateurs les plus puissants disponibles.

Que faire ?

Si la plus grande incertitude règne concernant le futur du travail et du salariat, ne pas pouvoir prévoir le futur ne rend pas moins indispensable de devoir le penser. Pourtant, les réflexions les plus abouties au sujet de l’impact de la nouvelle révolution industrielle sur l’emploi, le salariat, et les rémunérations, ne concernent (pour le moment) que le revenu de base (concept cité pour la première fois au 16ème siècle … depuis la mortalité infantile a beaucoup reculé, l’espérance de vie a beaucoup augmenté, la demande de protection sociale s’est faite croissante) et l’économie sociale et solidaire (confondue bien souvent avec la sharing economy) présentée comme une alternative aux pertes d’emplois à venir dans le secteur marchand. En conséquence, une longue liste de questions reste encore sans réponse : quelle protection sociale pour accompagner la révolution industrielle ? Comment faire entrer la fiscalité dans l’ère de l’économie numérique ? Comment accompagner la probable polarisation de la demande d’emplois[4]? Et surtout, comment dépasser l’assertion « les Etats-Unis (ré-)inventent l’économie numérique, l’Europe la règlemente » (et donc comment développer l’inventivité numérique européenne) ?

L’OCDE a été chargée par les ministres du travail des pays développés de rédiger une nouvelle stratégie pour l’emploi, la troisième en 22 ans (après 1994 et 2006), qui devrait notamment concerner l’accroissement tendanciel des inégalités de revenu, l’impact des progrès technologiques sur la demande de main-d’œuvre, l’organisation du travail, la sécurité sociale et la protection de l’emploi. Vivement ce rapport pour véritablement lancer, au-delà des sphères académiques, le grand, épineux et nécessaire débat concernant l’emploi et la protection sociale à l’ère du numérique et du probable bouleversement de l’organisation du travail !


[1] Elles ont aussi pu être considérées comme une opportunité d’en finir avec « l’asservissement des hommes par le travail ».

[2] Ceci explique également pourquoi l’emploi des femmes ou l’immigration n’est pas synonyme de montée du chômage.

[3] Voir : https://data.oecd.org/fr/emp/taux-d-emploi-non-salarie.htm

[4] Selon LinkedIn, parmi les dix métiers qui se sont imposés alors qu’ils existaient à peine il y a cinq ans certains sont directement liés aux technologies numériques (data scientist, cloud services specialist, IOS developer, Android developer, social media intern, big data architect) et d’autres sont particulièrement éloignés du numérique (professeur de zumba, coach beachbody)

Flashback : retour sur l’idée du mois consacrée à la financial literacy – Qu’en pensent les jeunes ?

« Expliquer la finance est un enjeu démocratique ». Cette déclaration de Camille Thommes, directeur de l’Association luxembourgeoise des fonds d’investissement (Alfi[1]), tombe à pic. D’une part car l’association nous avait consacré un billet invité sur l’investissement « à portée de main ». D’autre part, car par un verglaçant vendredi de janvier, IDEA avait réuni plusieurs organisations « jeunes » du Luxembourg pour échanger sur notre idée du mois consacrée à la financial literacy. Courageux du verbe mais pas téméraires, nous ne nous risquerons pas à définir l’adjectif « jeune ». Quoique… Testons un peu votre niveau de financial literacy !

Appliquez la formule de calcul de taux d’intérêt simple avec C, le capital emprunté de 500 euros, t le taux d’intérêt annuel de 3% sur C et n la durée du placement de 2 ans. Vous avez trouvé le gain ?[2] Eh bien la moyenne d’âge de nos invités était inférieure à ce résultat. Tout ça pour ça nous direz-vous?

Détrompez-vous. Suivant Alan Greenspan, économiste américain à la tête de la Réserve fédérale de 1987 à 2006, « the number one problem in today’s generation and economy is the lack of financial literacy ». Plus modestement, comme nous le constations dans notre neuvième idée du mois, les décisions financières ont un impact significatif sur la vie quotidienne des citoyens, qui sont confrontés à des problématiques de plus en plus complexes. De la compréhension de l’actualité et des concepts économiques tels que le salaire, les cotisations, au financement des études, des retraites, en passant par les stratégies d’épargne et d’investissement, nous sommes tous amenés à mobiliser des connaissances techniques pour procéder à des choix financiers. Au-delà des risques engendrés par de mauvais arbitrages, comme le surendettement, l’acquisition d’une « culture générale économique et financière » nous éclaire sur le monde dans lequel nous évoluons. Car la méconnaissance, voire la désinformation, face à ces sujets nourrissent aussi le populisme. D’où l’importance croissante de l’éducation financière.

Après avoir balayé les initiatives existantes au niveau mondial et en s’appuyant sur des « bonnes pratiques », IDEA a fait le point sur la situation au Luxembourg et émis 3 recommandations :

  • Dresser un état des lieux pour évaluer le niveau de compétences financières de la population du Luxembourg
  • Définir une stratégie nationale à long terme et un référent coordonnant l’ensemble des actions
  • Intégrer l’éducation financière dans les programmes scolaires

Objectif : fournir aux jeunes des fondements essentiels pour former des citoyens avertis

Pour assurer le suivi de sa contribution et la vitalité du sujet, IDEA a sollicité les organisations “jeunes” du Grand–Duché. 5 d’entre elles ont répondu présentes :

  • Chrëschtlech-Sozial Jugend (CSJ)
  • Déi jonk gréng
  • Jonk Demokraten Lëtzeburg (JDL)
  • Jonk Sozialiste Lëtzeburg (JSL)
  • Jonk Entrepreneuren Lëtzeburg (JEL)

Après lecture de notre contribution, chaque participant s’est exprimé sur la nécessité d’assurer une meilleure éducation financière des citoyens et sur les bonnes pratiques à développer dans le pays.

Si tous s’accordent sur l’importance de l’instruction financière et la nécessité de l’améliorer, leurs approches des cibles et des méthodes à privilégier sont plurielles.

       Les jeunes chrétiens sociaux (CSJ) et démocrates libéraux (JDL) mettent en avant le rôle du déterminisme social dans le degré d’instruction financière. Pour Elisabeth Margue (CSJ), le niveau de connaissances financières est souvent conditionné par le background socio-économique de la famille. Pour Estelle Malané (JDL), les parents doivent impérativement être ciblés par la stratégie d’éducation financière, car ils assurent l’instruction de leur progéniture – avant même l’école. Elle préconise notamment de toucher les familles en situation précaire et/ou surendettées. Pour elles deux, les écoles sont des relais de mise en œuvre d’une stratégie nationale d’éducation à la finance mais ne sauraient être les seuls.

      Nelson Fragoso des Jonk Entrepreneuren rejoint Estelle Malané (JDL) sur la nécessité de commencer l’éducation financière dès l’enseignement fondamental afin de pouvoir s’appuyer sur cette prise de conscience initiale et de l’approfondir dans l’enseignement secondaire. A travers les formations dispensées par Jonk Entrepreneuren, Nelson Fragoso a constaté que les élèves avaient souvent une perception erronée des prix immobiliers, automobiles et même des salaires. Estelle Malané (JDL) ajoute qu’un certain nombre d’entre eux ne saurait pas faire un virement ou lire une fiche de salaire. C’est pourquoi le programme de Jonk Entrepreneuren, Fit for Life, traite ces concepts en profondeur en faisant intervenir un volontaire provenant du monde professionnel auprès des élèves. De même, Jimmy Skenderovic (JSL) identifie un manque général d’informations sur le marché de travail dans le système scolaire. Ce qui tend à confirmer la nécessité d’une intégration précoce des concepts économiques et financiers au parcours éducatif.

      Par ailleurs, puisque les écoles ne sauraient être des canaux de transmission uniques, une approche « consommateur » et « citoyen » doit aussi être adoptée. Pour Elisabeth Margue (CSJ) et Jimmy Skenderovic (JSL), une structure fixe permettant à celles et ceux qui le souhaitent de trouver tous les informations relatives au financement d’un projet, aux risques potentiels d’un prêt ou au surendettement doit être mise en place. Cette proposition de plateforme de centralisation des informations et des initiatives a également été mise en avant par Estelle Malané (JDL) et Nelson Fragoso. Ils évoquent le modèle du Zentrum für politische Bildung[3] et jugent pertinent d’y intégrer un volet financier. Paul Matzet (Déi jonk gréng) approuve le principe mais met en garde sur la finalité de la plateforme : elle doit servir à informer, non à influencer.

« Laboratoire d’idées autonome, pluridisciplinaire et ouvert », IDEA a pour mission de mener des réflexions en faveur du développement durable du Luxembourg et de l’intérêt économique général du pays. Pour contribuer à l’amélioration de la qualité du débat socio-économique et proposer des pistes novatrices pour relever les grands défis d’avenir, il nous semble indispensable de discuter contradictoirement les analyses, idées et propositions que nous publions. En ce sens, ce premier rendez vous s’est avéré extrêmement prometteur. Pleins d’énergie, de ressources et d’idées, les participants se sont montrés enthousiastes à l’idée d’une collaboration régulière.

Notre tribune leur est officiellement grande ouverte.


[1]L’association est considérée comme un interlocuteur phare de la Place et un vecteur reconnu d’éducation financière.

[2]Formule : Résultat = 30

[3]Modèle allemand : https://www.bpb.de/

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Tableau de Bord de l’économie N°9 – Février 2016

Luxembourg

  • « Kleeschen » a résolument gâté le Grand-duché en 2015 : croissance et confiance des consommateurs dopées, chômage et dette réduits – et ce, au-delà des prévisions ! Selon le STATEC, l’acquis de croissance pour 2015 s’établirait à 4,8%, dépassant largement la prévision de 3,2% formulée en novembre 2015.
  • Autre motif de réjouissance : avec un taux de chômage de 6,7% en décembre 2015, le marché du travail luxembourgeois confirme son redressement. Sur l’ensemble de l’année 2015, le nombre moyen de chômeurs inscrits à l’ADEM a reculé de 2,6% par rapport à 2014, soit la première baisse depuis 2011. Au troisième trimestre 2015, la dette publique luxembourgeoise, exprimée en rapport avec la richesse économique produite, a diminué, s’établissant à 21,3% du PIB (22,9% au troisième trimestre 2014) et offrant au pays la médaille d’argent de la discipline budgétaire de la zone euro, derrière l’Estonie. Sur l’année, l’Etat luxembourgeois a perçu 3,8% de recettes fiscales supplémentaires par rapport à 2014 (+500 millions d’euros), soit un rythme de progression inférieur aux années précédentes (de 6,2% en moyenne), ce qui peut s’expliquer par le recul de 50% des recettes de la TVA sur le e-commerce et de 11,7% des droits d’accises. En revanche, malgré un léger rebond à 1,1% en décembre 2015 (0,5% sur l’année), le taux d’inflation devrait rester tel que les prochaines tranches indiciaires n’arriveraient à échéance qu’en juin 2016 et septembre 2017 selon la BCL, soit plus tard qu’anticipé à l’automne 2015.
  • Autre motif de réjouissance : avec un taux de chômage de 6,7% en décembre 2015, le marché du travail luxembourgeois confirme son redressement. Sur l’ensemble de l’année 2015, le nombre moyen de chômeurs inscrits à l’ADEM a reculé de 2,6% par rapport à 2014, soit la première baisse depuis 2011.
  • Au troisième trimestre 2015, la dette publique luxembourgeoise, exprimée en rapport avec la richesse économique produite, a diminué, s’établissant à 21,3% du PIB (22,9% au troisième trimestre 2014) et offrant au pays la médaille d’argent de la discipline budgétaire de la zone euro, derrière l’Estonie. Sur l’année, l’Etat luxembourgeois a perçu 3,8% de recettes fiscales supplémentaires par rapport à 2014 (+500 millions d’euros), soit un rythme de progression inférieur aux années précédentes (de 6,2% en moyenne), ce qui peut s’expliquer par le recul de 50% des recettes de la TVA sur le e-commerce et de 11,7% des droits d’accises.
  • En revanche, malgré un léger rebond à 1,1% en décembre 2015 (0,5% sur l’année), le taux d’inflation devrait rester tel que les prochaines tranches indiciaires n’arriveraient à échéance qu’en juin 2016 et septembre 2017 selon la BCL, soit plus tard qu’anticipé à l’automne 2015.

Zone euro

  • Bien que des vents favorables tels que la baisse des prix du pétrole, la faiblesse de l’euro, la plus grande neutralité des politiques budgétaires soufflent sur la croissance européenne, dans ses dernières prévisions hivernales la Commission européenne a abaissé de 1,8% à 1,7% ses projections pour la zone euro en 2016. Entre autres causes : des risques extérieurs accrus comme le ralentissement chinois, les craintes quant à la stabilité des banques dans certains Etats membres ou encore les conséquences socio-économiques incertaines liées à l’afflux de migrants.
  • Selon Eurostat, le marché du travail poursuit sa revitalisation avec un taux de chômage en baisse à 10,4% en décembre 2015 (10,5% en novembre et 11,4% en décembre 2014) en zone euro, au plus bas depuis 4 ans, et à 9,0% (idem en novembre et 9,9% de décembre 2014) en UE, le plus faible depuis juin 2009. Gare aux fanfaronnades hâtives : les disparités entre Etats sont fortes avec une amplitude de 20 points séparant les extrêmes. L’Allemagne et la République tchèque affichent des taux de chômage de 4,5%, quand la Grèce et l’Espagne sont respectivement à 24,5% et 20,8%.
  • Au troisième trimestre 2015, la dette publique a diminué de 0,7% par rapport au trimestre précédent pour s’établir à 91,6% en zone euro et de 1,7% pour atteindre 86% dans l’UE.
  • Le taux d’inflation annuel de la zone euro, comme celui de l’UE, stagne à 0,2% en décembre 2015. La BCE, qui s’est de nouveau montrée accommodante en décembre 2015, voit ses efforts pour atteindre la cible de 2% d’inflation sapés par la faiblesse des cours de l’or noir. Elle pourrait donc opérer un nouvel assouplissement monétaire en mars.

Reste du monde

  • Dans son discours de politique monétaire devant la Chambre des représentants, la présidente de la Fed, Janet Yellen, a annoncé que la hausse graduelle des taux directeurs, amorcée en décembre, devrait se poursuivre pour remplir le double objectif de plein emploi et de 2 % d’inflation. Pour autant, à court terme, l’orientation de la politique monétaire suivra l’évolution de la conjoncture mondiale et des indicateurs macroéconomiques américains, compromettant une hausse des taux cette année.
  • 6,8 : un double record… Celui du mois de décembre le plus chaud jamais enregistré depuis la mise en place de la station météorologique du Findel en 1947. Mais surtout celui du faible taux de croissance chinois au quatrième trimestre 2015. Pour l’année, le Bureau national des statistiques de Chine, l’a estimé à 6,9% soit le taux le plus faible depuis 1990. L’empire du milieu se mettrait-il au diapason des températures ?
  • La prédiction s’est répandue comme une traînée de poudre: selon une analyse du WEF, une nouvelle révolution industrielle bouleversera les business models (automatisation et désintermédiation) mais, surtout, transformerait le marché du travail en détruisant plus de 5 millions d’emplois dans les pays industrialisés ou en voie d’industrialisation. Vraiment ?

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