Healthcare system sustainability: a reality or a utopia?

Luxembourg is characterized by a rather generous public healthcare system that stands for universal access. However, given the economic constraints, this generosity brings the sustainability of  the healthcare system under question. With this report, Fondation IDEA aims at informing the greater public and the relevant stakeholders on the way forward by adopting a holistic and simultaneously international perspective on healthcare organization. The underlying  report identifies seven pillars of the Luxembourg health care sector considered as being crucial for its future development and offers a roadmap forward by identifying and engaging the relevant stakeholders playing a key role in dealing with the Luxembourg’s main healthcare issues.

The focus of this report is to raise awareness among the various stakeholders and prepare the grounds for a productive dialogue that will frame Luxembourg’s healthcare policy of tomorrow.

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Deux questions sur le budget

Le triptyque « budget 2015 – budget pluriannuel – paquet d’avenir» a été particulièrement commenté, voire décrié. Mais au-delà des postures et des intérêts particuliers, deux questions se posent alors qu’on s’achemine vers leur vote à la Chambre des Députés : le milliard d’euros de consolidation envisagé entre 2015 et 2018 sera-t-il suffisant ? Les efforts de consolidation budgétaire envisagés sont-ils « équitablement » répartis ? La Fondation IDEA avance des éléments de réponse.

Le milliard de consolidation envisagé sera-t-il suffisant?

Les efforts de consolidation décrits dans le projet de budget 2015 et le paquet d’avenir – un peu plus d’un milliard d’euros – sont une réelle avancée et relèvent en réalité du bon sens ; l’inaction était-elle vraiment une alternative au vu des déficits de l’Administration centrale engrangés année après année et des coûts futurs du « vieillissement » ? Néanmoins, les efforts de consolidation annoncés paraissent toujours quelque peu insuffisants – l’Administration centrale restant déficitaire à l’horizon 2018 malgré l’effort prévu – même s’ils ont le mérite d’exister.

D’une part, et il y a unanimité sur le sujet, le budget pluriannuel repose sur des hypothèses de croissance assez favorables. Des taux de croissance plus faibles que ceux retenus, synonyme de bases fiscales moins abondantes,, se traduiraient par un solde budgétaire effectif moins favorable qu’actuellement escompté et induirait des besoins de consolidation supplémentaires.

D’autre part, les documents budgétaires déposés à la Chambre des Députés en octobre sont déjà partiellement dépassés, puisqu’ils ont été « complétés » par des amendements introduits début décembre, dans la foulée des discussions du 28 novembre 2014 entre le Gouvernement et les trois principaux syndicats. D’après le récent rapport de la Commission des finances et du budget, l’incidence budgétaire négative de ces amendements serait de l’ordre de 50 millions, un manque à gagner qu’il faudra combler. Plus inquiétant encore (du point de vue budgétaire), une disposition à première vue assez sibylline de l’accord entre le Gouvernement et les syndicats, portant sur l’indexation des prestations familiales au salaire médian,[1] peut représenter, suivant la transposition qui sera retenue, jusqu’à 90 millions[2] d’euros de dépenses publiques supplémentaires ; un montant qu’il faudra là aussi dégager (en baisse de dépenses ou hausse des impôts) ailleurs.

Ainsi, le coût total du « paquet » concédé suite aux négociations du 28 novembre dernier pourrait atteindre jusqu’à 140 millions d’euros (hors incidence budgétaire de la transcription de la réforme des carrières de la fonction publique dans le secteur hospitalier et le secteur des aides et de soins), amoindrissant d’un septième à horizon 2018 la consolidation totale de l’ordre de 1 milliard d’euros évoquée en octobre 2014.

Pour toutes ces raisons, il est fort probable qu’il faudra compléter ce premier pas vers un assainissement budgétaire durable que constitue le « Paquet d’avenir » de quelques autres…

Les efforts de consolidation sont-ils équitablement répartis?

Prendre des mesures afin d’éviter que les finances publiques ne soient dans le rouge suppose d’augmenter les recettes et/ou de réduire les dépenses publiques. Il y a donc toujours des groupes (ménages, entreprises, associations, Instituts publics, etc.) qui seront touchés par de telles mesures. Dans le cas de la consolidation luxembourgeoise (premier pas insuffisant, cf supra), il semble dans une première lecture que la volonté affichée par le Gouvernement de « faire feu de tout bois » ait été respectée. En effet, tous les Ministères sont mis à contribution, et les plus de 250 mesures annoncées concernent à la fois les ménages, les entreprises, les associations, etc. Le fait que des levées de boucliers contre certaines mesures soient venues de différents bords (organisations syndicales, organisations patronales, associations, enseignants, etc.) tendent d’ailleurs à démontrer que le Gouvernement a effectivement « ratissé » large. Cette impression d’ensemble est corroborée par le fait que la hausse de TVA et la nouvelle contribution de 0,5% (rabotée depuis en « impôt d’équilibre budgétaire temporaire »), qui sont les deux mesures phares de cette consolidation, soient assises sur des assiettes fiscales relativement larges, le confirment d’ailleurs.

Néanmoins, en observant plus en détail, on remarque une discrimination en faveur de charges fiscales ou parafiscales (près de 70% du total des mesures de consolidation en 2015, toujours plus de la moitié à l’horizon 2018) au détriment des baisses de dépenses. De même, il semblerait que certains Ministères (Famille, Travail) – et donc certains groupes – aient été plus mis à contribution que d’autres. S’agissant de la répartition de la consolidation entre ménages et entreprises, très logiquement les ménages (plus nombreux et bénéficiant d’importants transferts sociaux) sont davantage sollicités que les entreprises (délocalisables et soumises à des impératifs de compétitivité). A cet égard, il sera important d’observer les effets de second tour de certaines mesures assises sur les ménages…sur la demande adressée aux entreprises. Notons d’ailleurs que l’opposition souvent faite entre les ménages et les entreprises est assez artificielle, les intérêts de ces deux groupes se chevauchant dans une très large mesure (importance de la demande des ménages pour les entreprises, importance d’entreprises dynamiques pour l’emploi et les revenus des ménages,…).

En définitive et à première vue, les efforts de consolidation semblent équitablement partagés, même si seule une analyse par catégories d’individus (déciles, impact sur le coefficient de Gini, etc.) permettrait d’étayer définitivement une telle conclusion. Plus généralement, les « anomalies » encore existantes (exemptions fiscales non économiquement pertinentes, sélectivité non optimale de certaines dépenses, etc.) pourront, pour certaines, faire l’objet de correction dans le cadre de la réforme fiscale à venir.


[1] « A partir de la mise en vigueur des nouvelles dispositions légales les montants des prestations familiales seront périodiquement adaptés en tenant compte de l’évolution de la valeur relative des prestations familiales en nature et en espèces par rapport à l’évolution du salaire médian. Dès lors qu’un écart à définir est constaté, une adaptation de la valeur de ces prestations est déclenchée au premier janvier de l’année qui suit celle au cours de laquelle l’écart a été constaté ».

[2] Ce montant (maximal possible) est calculé par rapport à la situation à « politique inchangée » où les prestations familiales ne seraient ni indexées sur les prix ni liées aux salaires – situation qui prévaut depuis les négociations tripartites de 2006.

2e « Matinale d’IDEA »: un échange animé au sujet de l’importance de la culture au Luxembourg

Quelque 25 personnes ont répondu à l’invitation de la Fondation IDEA et ont assisté le 4 décembre à la deuxième « Matinale d’IDEA ». Cette Matinale, organisée dans les locaux de l’Agence BGL BNP Paribas « Jardins du Luxembourg » à Merl, s’est tenue en présence de Mme Erna Hennicot-Schoepges, ancienne Ministre de la Culture, et a été le lieu d’un échange animé au sujet de l’importance de la culture au Luxembourg.

Monsieur Muriel Bouchet, Senior Economiste de la Fondation IDEA, a introduit la Matinale avec un mot de bienvenue suivi d’une brève introduction des activités d’IDEA et du principe des Matinales. Par la suite, M. Michel.-Edouard Ruben, Economiste d’IDEA, a présenté l’Idée du mois n°4 « Résolutions culturelles », une publication qui se veut à la fois un témoignage des attraits et atouts culturels du Luxembourg et une « modeste » contribution, faite de 10 résolutions, pour une mobilisation de tous les acteurs publics et privés en faveur de la culture. L’idée centrale de cette Idée du mois était que la politique culturelle, sans négliger le développement de l’offre, devait multiplier les actions en faveur de la demande.

Mme Hennicot-Schoepges a rappelé lors de son intervention que la culture ne peut pas être traitée comme un bien commercial, ni être instrumentalisée par l’économie (tourisme, nation branding, etc.). La culture a avant tout besoin du soutien moral de la société. Elle a affirmé que la culture avait besoin d’infrastructures, et ne devait pas être prisonnière des chiffres. A côté du besoin de nouvelles infrastructures (musée d’archéologie par exemple), elle a insisté sur le fait que l’éducation à la culture devait être une priorité.

Dès le début de la Matinale, le public a tenu à réagir sur ce sujet hautement émotionnel. Les interventions ont montré qu’il existait – non seulement au niveau national, mais aussi au niveau européen – un désaccord sur le périmètre statistique des activités culturelle et créatives. Ce sujet a d’ailleurs profondément marqué tout le cours de la Matinale.

Les échanges nourris lors de cette Matinale ont prouvé combien il y avait une attente pour un débat public d’envergure sur la culture dans le pays.

L’Immigration e(s)t le « modèle luxembourgeois »

Les flux migratoires sont un élément indissociable du succès économique du Grand-Duché : l’immigration fait partie du modèle d’affaires, de l’ADN, de la réalité quotidienne luxembourgeoise. C’est donc un sujet très important, qui, hélas, ne jouit pas toujours de l’attention qu’il mérite[1].

Le Grand-Duché a développé cette caractéristique d’être terre d’immigration dès ses premiers efforts d’industrialisation. Jadis pays agricole – avec un décollage industriel tardif – notre pays était alors une terre d’émigration, avec jusqu’un quart de la population souhaitant chercher leur fortune ailleurs vers le tournant du 19e siècle. La première vague d’immigration est liée au succès de la production sidérurgique et minière. Suite à la crise sidérurgique des années 1970, le Grand-Duché réoriente son économie vers d’autres activités et d’autres secteurs – le secteur financier et des services en général prennent la relève. A nouveau, la disponibilité en maind’œuvre locale est insuffisante pour développer ces secteurs, quantitativement et qualitativement de par les compétences, la capacité d’investissement et le savoir-faire disponibles sur place.

Au gré des décennies, à la migration économique et saisonnière s’est jointe la migration familiale. La migration qu’on peut qualifier de journalière s’est également rajoutée : le travail frontalier a progressé de 450% au cours des dernières 20 années. Enfin, n’oublions pas la migration des fonctionnaires internationaux, qui sont aujourd’hui au nombre de 10.700. Nous observons donc de multiples vagues d’immigration, d’intensités diverses et sur toute l’étendue de l’échelle sociale.

Depuis le début des années 2000, et à l’insu de nombreux commentateurs, nous assistons même à une véritable explosion migratoire, en passant de 11.800 nouvelles arrivées en 2000 à plus de 21.000 arrivées en 2013, soit non loin d’un doublement de l’intensité migratoire. Avec une part d’étrangers dans la population de 45,3%, nous dépassons de loin la moyenne européenne, qui atteint 6,6%.

Immigration nette 
Source: STATEC

Autre fait méconnu : si les Européens constituent clairement la plus grande partie des résidents étrangers, le nombre de personnes provenant de plus loin a considérablement augmenté ces dernières années. Nous comptons environ 11.600 résidants de nationalité étrangère provenant de pays tiers (hors Union européenne), tandis qu’en 2005 nous en comptions moins de 8.000, une hausse de presque 50%.

Après avoir progressivement tenté, souvent avec succès, de diversifier son économie en l’ouvrant à de nouveaux secteurs d’activité, le Luxembourg se concentre aujourd’hui principalement sur ce qui est communément appelé « niches de compétences », des secteurs porteurs d’avenir, tels que les technologies de l’information et de la communication, les technologies de la santé, et les écotechnologies et les énergies renouvelables ou encore la logistique. A l’avenir, l’économie sera sans doute encore davantage amenée à asseoir sa croissance dans de telles niches en attirant les « meilleurs cerveaux » au Luxembourg, indépendamment de leur origine ; sans pour autant oublier de former et de qualifier la main-d’œuvre luxembourgeoise pour qu’elle trouve sa place dans l’économie du savoir.

Il est donc plus urgent que jamais de créer un environnement propice et attrayant, adapté aux besoins spécifiques des travailleurs dont nous avons besoin. Pour ce faire, nous devons éliminer les entraves qui existent et faciliter le recrutement de salariés de l’étranger, notamment pour les ressortissants hors-UE qui ne jouissent pas de la libre circulation et qui souhaitent malgré tout s’installer au Luxembourg et contribuer à son développement.

Par ailleurs, le Luxembourg doit réaliser que sa force d’attraction ne doit jamais être tenue pour acquise et qu’il faut constamment veiller à ce que le cadre politico-économique soit propice à l’accueil et à l’intégration dans l’économie et dans le tissu social de nouveaux flux humains et de capitaux. Il faut notamment avoir le courage de faire évoluer ce cadre, de l’adapter au monde sans cesse changeant et sans cesse plus globalisé qui nous entoure.

Ce qui m’amène à aborder un autre point : nous devons encourager une vraie intégration des migrants, car nous nous adressons, pour rappel, à plus de 45% de la population. Il s’agit de consolider un niveau élevé de cohésion dans notre société par une politique d’intégration volontariste, visant notamment à réduire les barrières linguistiques, à faciliter l’accès aux droits politiques et à la nationalité luxembourgeoise, à donner lieu à système éducatif plus inclusif, ou encore à créer des lieux de rencontre entre Luxembourgeois et non-Luxembourgeois à travers les clubs et associations. A contrario, nous devons veiller à éviter la création de sociétés parallèles au sein de notre société multiculturelle. Il faudrait plutôt que les différentes composantes culturelles finissent par se fondre dans le projet de construction permanente d’une « communauté de vie luxembourgeoise ».

Pensons aussi aux enfants des résidents étrangers. L’éducation est un facteur essentiel dans le processus d’intégration des enfants étrangers et de leurs familles : le premier contact avec les valeurs et les règles de la vie sociale se fait à l’école. Elle prépare aussi les jeunes à accéder à la vie professionnelle et d’une façon plus générale, à l’intégration et à l’autonomie économique et sociale. Or, des défis persistent au niveau de l’intégration des enfants étrangers dans les écoles. Ainsi, la dernière étude PISA, mais aussi les études menées au niveau national, montrent que les divergences sociales et culturelles des élèves constituent l’un des principaux défis dans les écoles luxembourgeoises. Selon une étude du CEFIS[2], presqu’un enfant immigré sur trois accuse un retard d’au moins un an, avant même d’accéder à l’enseignement secondaire. Nous ne pouvons pas nous permettre de faire l’autruche face à ces constats inquiétants.

Plus globalement, je pense que nous devons déployer de grands efforts pour faire comprendre à tous que l’immigration est devenue un élément fondamental et indissociable de l’identité luxembourgeoise et en quelque sorte dépoussiérer le « Mir wëlle bleiwe wat mir sinn». L’immigration doit sortir de son « coin tabou » car elle se confond avec la réalité luxembourgeoise et n’existe pas en parallèle à cette réalité. La diversité doit être comprise comme étant une de nos principales forces et une vraie opportunité dans un monde de plus en plus globalisé.

C’est le bon moment de s’engager dans ces travaux. La Présidence européenne est à nos portes – profitons de cette occasion pour transmettre les grands messages de la politique d’intégration et de diversité – à rebrousse-poil du discours de repli identitaire en vogue dans certains pays – et intégrons ces éléments dans notre stratégie de marque-pays ou de « nation branding ». Ce faisant, nous réussirons sans doute à améliorer aussi l’image de notre pays à l’étranger, qui n’est pas souvent la meilleure alors que tous les ingrédients sont là pour faire du Luxembourg le laboratoire mondial de l’ouverture, de la diversité et de l’intégration.


[1] Aujourd’hui, 3 salariés et entrepreneurs sur 4, qui créent la richesse au Grand-Duché, ne sont pas Luxembourgeois. Relevons à cet égard également que seulement 38,8% des résidents au Luxembourg n’ont pas d’arrière-plan migratoire. Cela veut dire que les « Luxembourgeois pure souche », nés au Grand-Duché et de parents tous les deux également nés au Luxembourg sont encore moins nombreux que l’on ne croit.

[2] Centre d’étude et de formation interculturelles et sociales.

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Sharing economy – (r)évolution de la mentalité de consommation

Échanger plutôt que d’acheter, emprunter plutôt que d’avoir. Partout dans le monde, de nouveaux modèles sociaux comme notamment la sharing economy (ou économie du partage, économie collaborative) se mettent en place, et avec eux une culture alternative de la consommation dans laquelle les consommateurs deviennent des utilisateurs, plus que des propriétaires. Cette évolution, qui constitue une mutation culturelle profonde, s’appuie pour l’essentiel sur l’émergence et les progrès des technologies et sur l’évolution des valeurs.

Aujourd’hui, de nombreux jeunes de la génération Y[1] ont une approche de la « consommation » différente de celle de leurs parents, articulée autour de la devise « partager au lieu d’acheter ». Cette génération préfère ainsi utiliser les biens et services, plutôt que de simplement les posséder, et ne considèrent plus forcément la possession de biens de luxe comme le graal absolu. Au lieu d’accumuler des biens, elle poursuit d’autres priorités – l’échange, les sensations, des expériences authentiques. Si économiser de l’argent demeure toujours une nécessité (notamment pour se constituer une épargne de précaution), cette génération fait émerger avec elle l’économie de la fonctionnalité en lieu et place d’une économie de l’accumulation.

La sharing economy et la confiance qu’elle implique entre de parfaits inconnus trouvent sa genèse notamment chez le géant eBay, qui a créé des places de marché entre particuliers. Dès ses débuts, la plateforme d’enchères en ligne a misé sur l’honnêteté en inventant le principe de l’évaluation mutuelle entre les utilisateurs, acquéreurs et vendeurs, soit l’élément clé de succès des échanges « peer-to-peer » (P2P, de particulier à particulier). La création d’une communauté autour d’un site fait qu’il est aujourd’hui banal de laisser sa chambre à coucher ou sa voiture à des étrangers que l’on ne connaît que par internet et par ses systèmes d’évaluation. La seconde étape importante qui a permis le développement de l’économie du partage a été l’apparition de Napster, un réseau de partage de fichiers P2P sur internet qui a permis à des millions de personnes d’échanger de la musique gratuitement…et de manière plutôt illégale.

Si la consommation collaborative (« co-consommation ») n’est pas un phénomène économique nouveau – le troc existe depuis des siècles -, les nouvelles technologies lui ont cependant offert une nouvelle dynamique en permettant de rassembler très facilement toutes les personnes qui souhaitent échanger, louer ou acheter des biens ou services. Ainsi, la grande transparence imposée par Internet favorise un climat de confiance propice à cette nouvelle façon de consommer. En outre, ces services collaboratifs ont engendré de nouveaux standards en remettant à l’honneur le produit/le service et l’expérience vécue par le client.

De nombreuses entreprises collaboratives ont été créées entre 2008 et 2010, dans la foulée de la crise financière mondiale et sont venues combler le besoin de plus en plus de consommateurs d’être des consom-acteurs et non plus des consommateurs passifs.[2] En ces temps de crise, l’économie collaborative a permis de redistribuer du pouvoir économique aux consommateurs, un phénomène aussi connu par la notion de l’ « empowerment » – redonner du pouvoir aux individus. En réduisant les intermédiaires, ces plateformes en ligne donnent, entre autres, aux individus la possibilité de réduire les coûts de transaction et de créer une économie plus inclusive ou les besoins humains passent avant la force marketing.

Mais en dépit de son développement, la sharing economy n’est pas sans poser des défis majeurs. Elle pose ainsi d’importantes questions de responsabilité et est potentiellement source de conflits (politiques et sociaux) en perturbant parfois brutalement des secteurs traditionnels et conservateurs ; en témoignent les mouvements de grèves des chauffeurs de taxi contre Uber[3] qui ont eu lieu cet été dans différentes villes européennes. Cela souligne que le déploiement de la sharing economy ne se fera pas sans heurts, et plaide en faveur de régulation publique de cette économie de partage ; les acteurs de la sharing economy doivent avoir le droit de bien faire, et non pas le droit de tout faire. Il reste à voir comment les gouvernements vont s’attaquer à cette (r)évolution de la consommation collaborative.


[1] La génération Y regroupe des personnes nées approximativement entre le début des années 1980 et le milieu des années 1990.

[2] Faible évolution de la sharing economy au Luxembourg jusqu’à présent. Quelques projets connus : NUBS (plateforme de crowdfunding) ; Vel’oh (système de vélos à libre service) ; service de Carsharing pour la ville de Luxembourg (prévu pour 2015) ; 1535°C (donne la possibilité de louer des espaces durant une période définie pour du «co-working», à partir de 2015).

[3] Une entreprise qui développe et opère des applications mobiles qui mettent en relation les usagers du service et des conducteurs de covoiturage.